Monday, February 06, 2017

Vous vous souvenez peut-être, lecteurs en délire, que j'avais décidé de rédiger des chroniques de fiction basées sur les rocambolesques aventures d'une collègue, Lali, à qui je répète depuis des années qu'il lui faut une sitcom, ou à tout le moins un blog. Ma liste de sujets était prête, mais après lecture de la première chronique, Lali n'était plus trop à l'aise avec l'idée d'être au centre d'une chronique. Je dois donc malheureusement avorter le projet, mais, puisque je me suis quand même donné la peine de rédiger la première chronique, la voici :


Les chroniques de Lali
Chronique 1 : Les orteils de Lali

Salut, moi c'est Lali.

Bon, comme c'est ma première chronique et tout, j'avais l'intention de faire les choses comme il faut et de commencer par me présenter.

Mais finalement, au diable les présentations - parce que je suis fâchée! Pourquoi? Ah, merci de poser la question; juste ça, ça me fait du bien... Enfin, voici :

Vous le sauriez si je m'étais présentée en bonne et due forme : je fais partie d'une équipe de natation qui s'entraîne quelques matins par semaine. En gros, pour simplifier, ça veut dire qu'on se met en ordre dans un couloir (le plus rapide en avant, le plus lent derrière) et qu'on fait des longueurs. En théorie, c'est parfait. En pratique, pas du tout.

Ou plutôt, je suis convaincue que c'est parfait quand vous n'êtes pas systématiquement suivie, dans votre couloir, par un vieux bedonnant fétichiste qui vous pogne systématiquement les orteils en nageant, BOR.DEL.

Sérieusement, il me rend folle. Et là, je vous entends, vous pensez que c'est moi qui suis crinquée et intolérante parce que le pauvre monsieur, c'est certain qu'il ne fait pas exprès pour m'accrocher les orteils, qu'il fait de son mieux et que je devrais être indulgente. Mais vous avez tort. Parce que je SUIS indulgente, je ne suis que ça, j'ai déjà passé trop de temps à lui accorder le bénéfice du doute. J'ai commencé par tergiverser vraiment trop longtemps avant d'aborder le sujet avec lui. Puis, je lui ai demandé, GENTIMENT (oui oui, je le jure), et plus d'une fois, de me lâcher les orteils. Je lui ai offert à plusieurs reprises de se placer devant moi - que ce soit au début de l'entraînement, avant que l'on plonge tous à l'eau, ou pendant, après m'être fait pogner les orteils deux ou trois fois. J'ai même essayé de ralentir exagérément pour qu'il soit forcé de passer devant moi - et là, vous savez quoi? Il s'est foutu devant moi, et il a RALENTI jusqu'à ce que le premier de notre groupe, le plus rapide, nous rattrappe. (Ma théorie, c'est qu'il voulait que je lui pogne les orteils à mon tour, mais pour ça, il va attendre longtemps, je suis sûre qu'il a pleins de champignons toxiques sur les pieds. De toute façon, MOI, je regarde où je vais quand je nage.)

Ce matin, donc, j'ai sauté ma coche. Je me suis tournée vers lui à la fin de la première série de longueurs, et je lui ai demandé (bon, oui, peut-être un peu fort, et un peu sèchement) c'était quoi son bâtard de problème et qu'est-ce qu'il avait pas compris quand je lui avais demandé de me lâcher les orteils les 365 980 fois précédentes. Ça se peut aussi que je lui aie posé ces questions-là en gesticulant légèrement (et au cas où vous aviez aussi l'intention de gesticuler dans une piscine bientôt, je vous dirai d'opter pour une autre solution parce que franchement, on perd un peu de crédibilité quand on engueule quelqu'un au beau milieu des copieux "splashes" ainsi engendrés). En réponse, il a pris un air de chien battu et s'est attribué le rôle de la victime en m'expliquant que c'était pas de sa faute parce qu'il était vieux, et qu'il était vieux, et, surtout, qu'il était vieux.
Pis bon, évidemment, c'est moi qui ai eu l'air de la débile mentale en plein SPM. C'est exactement le même principe que quand, enfant, vous vous chicaniez avec votre soeur; elle vous approchait et vous pinçait subtilement, et quand vous, suite à cette provocation, vous vous mettiez à la tapocher en bonne et due forme, c'est elle qui se mettait à crier au meurtre, et c'est vous qui étiez punie... Enfin, dans le cas qui nous occupe, je n'ai pas été punie (il manquerait plus que ça!), mais j'ai subi le regard interloqué de tout le troupeau de vieux monsieurs bedonnants qui nagent dans le même couloir que moi et Monsieur Fétiche. (Parce que ce genre d'animal-là est plutôt du genre grégaire et, manifestement, a tendance à nager à la même vitesse que moi. Et que moi seulement, puisque je suis le seul être non seulement de sexe féminin, mais aussi âgé de moins de 75 ans, dans ce couloir-là. Si ce n'est pas suffisant pour vous convaincre qu'il y a une conspiration en quelque part, je sais pas ce que ça va vous prendre.)

Donc, voilà, mon sautage de coche, mis à part le fait qu'il m'a fait du bien momentanément, n'a sans doute rien donné. C'est déprimant. Et c'est pour ça que je suis trop fâchée pour envisager de rédiger une chronique cohérente dans laquelle je me présenterais.

Cela dit, j'ajouterai, juste comme ça, qu'il y a peut-être une rumeur, que je refuserai de confirmer ou d'infirmer, qui veut qu'en sortant de la piscine, je me sois malencontreusement assise sur la petite serviette en microfibre que Monsieur Fétiche utilise pour s'essuyer le visage entre chaque série de longeurs, et que j'aie pété dessus. Mais bon, c'est juste une rumeur.

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